Malnutrition, pas tout à fait en recul
On a tous en tête l’image de l’enfant maigre avec un gros ventre. Mais il y a aussi celle de l’obèse américain. Quant à l’objectif « faim zéro » du Millénaire, il s’enlise. Focus sur la malnutrition.

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Malnutrition : la définition de l’OMS
Enjeu de santé publique reconnu par l’Organisation Mondiale de la Santé, la malnutrition est la cause de la moitié de la mortalité infantile mondiale, soit trois millions d’enfants de moins de cinq ans chaque année.
L’Organisation Mondiale de la Santé définit cette notion comme « le déséquilibre cellulaire entre la source de nutriments et d’énergie et les exigences du corps permettant d’assurer la croissance, l’entretien et les fonctions spécifiques ».
La malnutrition n’est ainsi pas uniquement la sous-alimentation : elle désigne la dénutrition et le surpoids, l’un n’étant pas l’inverse de l’autre. Les deux sont un déséquilibre au regard des besoins énergétiques et nutritionnels de l’organisme.
La malnutrition dans le monde
Famine extrême en Érythrée et au Burundi, malbouffe américaine où la moitié de la population est obèse : si l’insécurité alimentaire a globalement reculé dans le monde, la malnutrition est un phénomène en expansion.
Selon l’OMS, pendant que 500 millions de personnes sont en insuffisance pondérale, près de deux milliards d’adultes au monde sont en surpoids. Concernant les enfants de moins de cinq ans, 41 millions sont obèses ou en surpoids, pendant que 160 millions souffrent d’un retard de croissance par carences nutritionnelles.
Quant aux femmes en âge de procréer, plus de 500 millions soit près d’un tiers d’entre elles sont anémiées. Vingt millions d’enfants naissent avec un poids insuffisants, soit inférieur à 2,5 kilos.
La malnutrition n’est donc pas l’apanage des pays « en voie de développement », mais de la pauvreté : les aliments dénués de nutriments sont les moins chers. Un sachet de douze pains au chocolat industriels ne coûte rien, ce qui n’est pas le cas d’un kilo de fruits ou de légumes.
Les deux grands types de malnutrition
La dénutrition se présente sous deux formes, chronique et aiguë. La malnutrition chronique est celle sur le long terme : elle touche plus de cinquante millions d’enfants au monde, à l’alimentation composée, par exemple, uniquement de céréales.
La malnutrition aiguë est celle qui touche vingt millions d’enfants en bas âge au monde (moins de 24 mois). Famines, épidémies, zones de conflits, c’est elle qui est la principale cause de la moitié de la mortalité infantile par dénutrition.
Au sein de l’ONU, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) est en charge de la malnutrition chronique, l’Unicef de la malnutrition aiguë, celle-ci étant une urgence médicale.
La malnutrition et la « faim invisible »
Dénutrition et surpoids ont des conséquences différentes : la dénutrition occasionne des retards de croissance, une insuffisance pondérale et des carences. Le surpoids génère la panoplie des pathologies que sont le diabète, les cardiopathies, les accidents vasculaires cérébraux, le cancer.
Mais ces deux formes de malnutrition en apparence opposées ont un point commun : la « faim invisible ». Ainsi appelée par l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (Ifpri), qui publie chaque année son Global hunger index (GHI) de mesure de la faim dans le monde par pays, cette « faim invisible » est en expansion.
Elle désigne la carence en vitamines, minéraux ou oligo-éléments (zinc, iode, fer, vitamines A et B) au point d’altérer la santé et le développement. Or, pendant que 800 millions de personnes au monde souffrent de sous-alimentation, deux milliards soit plus du double, souffrent de « faim invisible ».
Malnutrition infantile
Elle est donc la cause de la moitié de la mortalité infantile au monde. Certaines carences sont cruciales (fer, iode, vitamine A) lors de la vie fœtale, puis de l’allaitement en cas d’anémie maternelle, et ensuite lors des deux premières années de la vie, déterminantes pour le développement.
Ainsi l’Institut Pasteur pointe-t-il le véritable cercle vicieux de la malnutrition : mentalement, ces enfants éprouvent des difficultés d’apprentissage, qui les pénaliseront encore plus pour sortir de la pauvreté.

Par ailleurs, l’Institut Pasteur estime que 75% des enfants des pays en voie de développement souffrent d’« entéropathie environnementale pédiatrique » (PEE), inflammation chronique de l’intestin.
En effet, chez ces enfants, l’intestin grêle est fragilisé : les replis en sont raccourcis et la muqueuse perméable. Résultat, la barrière microbienne est altérée, au point que le système immunitaire doit s’activer de façon chronique, le tout dans un contexte d’insalubrité.
La PEE est aujourd’hui reconnue comme la première cause de malnutrition infantile. De surcroît, chez ces enfants, certains vaccins cessent d’être efficaces.
Malnutrition culturelle
C’est la psychanalyste spécialiste de l’enfance Sophie Marinopoulos, qui est l’auteure de l’expression de « malnutrition culturelle », employée dans le rapport à ce sujet qu’elle a remis en juin 2019 au ministre de la Culture.
Sophie Marinopoulos a créé Les Pâtes au beurre, lieux de paroles gratuits et sans rendez-vous, pour aider les familles. La « malnutrition culturelle » est l’absence ou la mauvaise qualité du lien, souvent parents-enfants, due à notre mode de vie.
La psychanalyste pointe, par exemple, le rythme de l’éveil d’un enfant, fait de répétitions et d’échec, que notre mode de vie contredit. Quant aux écrans, ils éludent la relation : soit l’enfant est placé devant un écran pour laisser l’adulte tranquille, soit l’adulte le nez collé à son portable est psychiquement absent pour lui.
La « malnutrition culturelle » est un nouveau « défi sanitaire », par carence de la relation.
Les symptômes de la malnutrition
Elle hypothèque d’autant l’existence, qu’elle touche les femmes enceintes et les jeunes enfants : naissance prématurée, retards de croissance, infirmités, lésions cérébrales, cécité, système immunitaire affaibli, etc.
Les solutions à la malnutrition
Dans le cadre des Objectifs du millénaire, l’ONU avait fixé l’objectif « faim zéro », pour éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire et la nutrition et promouvoir l’agriculture durable dans le monde, d’ici à 2030.
La FAO et des agences nationales (l’Agence Française de Développement) mettent en place des programmes d’aide à l’agriculture : les trois quarts de populations malnutries sont des populations rurales, aujourd’hui soumises aux pressions supplémentaires des effets du changement climatique (sécheresse, inondation), qui viennent s’ajouter aux situations endémiques (état d’insalubrité) et politique (conflits, etc).
L’agriculture durable et l’accès des populations sinon à la propriété, aux revenus de sa culture, sont une clef importante de la malnutrition.
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