Animaux sauvages

Le lagopède, baromètre de la dégradation de l’environnement

Emblématique de la haute montagne, le lagopède est un champion de l’adaptation au réchauffement climatique. Aujourd’hui, il en est la victime.

Le lagopède, baromètre de la dégradation de l’environnement

Une « relique glaciaire »

Lagopède arctique

C’est l’oiseau le mieux adapté au froid : originaire de la région circumpolaire (l’Alaska, la Sibérie, le Groenland), le lagopède supporte des températures négatives jusqu’à -35 degrés.




Lagopède des saules, celui d’Alaska

Étroitement lié au saule nain de la toundra, le lagopède des saules est le plus grand de tous. Cet emblème officiel de l’Alaska est une espèce commune nullement menacée. Il est vrai qu’elle est présente au Canada, en Russie et en Finlande.

Lagopède d’Écosse

Il est une sous-espèce de celui des saules. Il vit dans les bruyères, tourbières et prairies du Royaume-Uni et d’Irlande.

Lagopède alpin

Le lagopède présent en France est une « relique glaciaire » : les 5000 à 8000 couples nicheurs des Alpes et des Pyrénées sont tous issus de ceux qui y ont trouvé refuge lors de la phase de réchauffement (Holocène) qui a succédé à la dernière glaciation (le Pliostène).

Ces lagopèdes ont suivi le recul des glaciers. Et continuent de le faire. Ils sont les derniers témoins de leurs espèces, confinés aux secteurs d’altitude de ces deux chaînes montagneuses.

Depuis la fin du Pliostène, les espèces « méridionales » des Alpes (Lagopus muta helvetica) et des Pyrénées (Lagopus muta pyrenaica) sont génétiquement différentes de leurs congénères de l’Arctique.




Lagopède des Pyrénées

Dans les Pyrénées, les lagopèdes n’ont d’ailleurs plus le même patrimoine génétique : isolés du reste des Pyrénées, ceux du Puigmal et du Canigou sont génétiquement appauvris. Une autarcie qui représente un risque pour leur faculté d’adaptation.

Lagopède : définition et présentation

Le lagopède ou « perdrix blanche » fait partie de la famille des tétras, tout comme le coq de bruyère, il a des narines, les pattes emplumées et des « caroncules », excroissances rouge vif au-dessus de l’œil.

Le lagopède a une silhouette de petit faisan, avec un poids de 500 gr en moyenne, pour une envergure de 60 cm environ. Son nom signifie « pattes de lapin » : ses pattes singulières lui servent de raquettes dans la neige.



Les mues de son plumage

A la différence des autres oiseaux, le lagopède mue trois fois par an au lieu de deux : un dégradé saisonnier complet, depuis le blanc immaculé de l’hiver jusqu’au foncé strié presque noir de la période estivale. Un bronzage à l’envers….

De la mi-avril à la mi-juin, la mue pré-nuptiale fonce son plumage (chez le mâle, le ventre reste blanc), puis de juillet à septembre, la mue post-nuptiale lui fonce y compris les ailes. Le mâle est alors tout gris sombre et strié, la femelle rousse : à l’automne, ce processus s’inverse jusqu’au blanc, à l’exception du bout de la queue qui reste noire.

Un oiseau de montagne
Un oiseau de montagne

Son alimentation

Seul le poussin a un régime animal (insectes, araignées, escargots).

Sitôt adulte, le lagopède est végétarien : bourgeons, brindilles de saules, joncs, tiges, myrtilles dans les Alpes à la belle saison. Le lagopède avale aussi de petits gravillons, pour faciliter sa digestion.

Son habitat

Le lagopède vit entre 1800 et 3000 mètres d’altitude. Mais bien qu’aimant l’hiver, il n’aime ni les pentes ensoleillées, ni les sapins : le contraire de nous ? Il recherche les milieux ouverts des pentes broussailleuses avec une grande diversité de cailloux et de formations rocheuses : globalement, les versants nord à l’abri à la fois du soleil et du vent.




Hormis la période nuptiale, mâles et femelles vivent séparément : au printemps et à l’automne, le mâle prise encore plus les crêtes rocheuses, qui lui servent de promontoire de surveillance ; en hiver, la femelle s’abrite sous le couvert.

Mais cet oiseau est éminemment sédentaire : avec l’arrivée de l’hiver, il change de versant ou de sommet. Les observations ont néanmoins permis de noter que certains spécimens migraient de façon saisonnière de cinq à sept kilomètres dans le Haut-Giffre (entre le lac Léman et Chamonix), sur une distance plus importante dans les Pyrénées.

Sa reproduction

Lors de sa parade nuptiale, le mâle encercle la femelle, le chant rauque, la caroncule dilatée et la queue en éventail, dont une plume finit auprès de celle-ci !

La femelle pond une petite dizaine d’œufs dans un nid à même la roche, les quelques prédateurs venant du ciel (l’aigle royal). Après une incubation de vingt-et-un jours, les poussins s’aventurent : ils sont autonomes au bout de dix jours.

Le cri du lagopède

Au moment de la reproduction, le mâle adopte un cri assez grinçant pour attirer la femelle !

L’effondrement des effectifs

Quasi-menacé d’extinction, cet oiseau figure à la liste rouge mondiale des espèces menacées de l’Union internationale pour la conservation de la nature.

Dans les Alpes françaises, le lagopède alpin a vu ses effectifs diminuer de 34% depuis les années 1950, de 13% depuis 1999. Même constat côté suisse, qui compte 40% des effectifs alpins : le lagopède y est désormais inscrit sur la « liste préventive » (espèce préoccupante).

Côté français, les quatre départements de la Haute-Savoie, la Savoie, l’Isère et la Drôme, hébergent le lagopède. Mais il se cantonne désormais aux zones d’altitude élevées et orientales de la Savoie (du Chablais à la Vanoise) et de l’Isère (Belledonne, Grandes Rousses, Écrins).

Lagopède : les menaces

La pression humaine

La pression humaine et le réchauffement climatique réduisent comme peau de chagrin l’habitat du lagopède : les associations (LPO et associations de montagne) ont tiré à maintes reprises la sonnette d’alarme, pour qu’il n’ait plus le statut de gibier mais d’espèce protégée.




La réduction de l’habitat du lagopède est multiple : sur-fréquentation de la montagne en hiver comme en été, pratique du hors-piste et randonnées hors des sentiers balisés, pâturage intensif par les moutons (modification du milieu et risques de piétinement), extension des domaines skiables (câbles aériens, tirs d’explosifs pour des déclenchements préventifs d’avalanches).

Côté suisse, on estime qu’à l’horizon 2070, le lagopède aura déserté les Alpes.

Victime du réchauffement climatique ?
Victime du réchauffement climatique ?

Le réchauffement climatique

En dépit de son inadaptation à la chaleur, les observations ont révélé que cet oiseau résistait pourtant bien aux températures fortes de certains mois de juillet : parviendrait-il à s’adapter aux pics de chaleur ? Cette fois, il risque de disparaître avant de s’être adapté.

Pour en savoir plus

Nos articles sur les animaux et la nature :

Pascale

Née en 1960 à Dakar au Sénégal, Pascale est toujours un peu cet enfant qui a grandi au bord de la mer, même si elle vit aujourd’hui à Paris. Les obligations professionnelles de ses parents l’ont amené à voyager à travers le monde et à rejeter le matérialisme pour se concentrer sur l’humain. Quand elle arrive en France pour faire Sciences Po Paris, c’est un grand décalage qui l’attend. Elle conforte alors sa vision de la vie aux autres jeunes gens de son âge. Elle s’habitue à ce nouveau rythme, mais c’est la perpétuelle recherche du « reste du monde » qui la guide et la mène au journalisme. Elle découvre la radio, elle collabore d’ailleurs toujours à Radio Ethic, puis le média web. Ses domaines de prédilection : le sport, pour sa dimension d’échanges et partages, et l’écologie bien sûr. Elle la vit au quotidien en se déplaçant à bicyclette et trouvant toujours une astuce récup’ pour ne pas acheter neuf inutilement. Elle rejoint l’équipe de Toutvert.fr en 2016, dont elle devient rapidement un pilier central !

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